Le 8 mars, le CDOM92 a accueilli le Dr Jacques Lucas (Président de l’ANS, Agence du Numérique en Santé et ancien Premier Vice-Président du CNOM) et une trentaine de consœurs et confrères.
Les thèmes de cette table ronde étaient la téléconsultation et la e-réputation. Les nombreuses questions sur la téléconsultation abordées ne nous ont pas permis d’aborder le thème sur l’e-réputation. Nous vous proposons de lire nos recommandations concernant les avis google sur notre site (https://conseil92.ordre.medecin.fr/articles/pratiques/1180) et sur le site du CNOM . Nous vous proposons ici un résumé des échanges et des questions posées. Après un rappel des règles pour les médecins installés pour effectuer des téléconsultations (être le médecin traitant, utiliser un outil sécurisé adapté.https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044833722 ).
Les débats ont permis de faire émerger plusieurs définitions utiles, et une graduation d’utilisation de la télémédecine :
A/ Téléconsultation par téléphone, qui avait été autorisée au cœur de la pandémie, mais n’est plus considéré comme une téléconsultation.
B/ Télé régulation : utilisation des outils de télémédecine pour réguler l’activité d’urgence.
C/ Télé suivi d’un patient grâce à un service ou un dispositif (MyDiabby pour le diabète par exemple)
D/ Téléconsultation entre un médecin et son patient (via un outil en parallèle de l’activité en cabinet, ou via un service de télémédecine commercial).
E/ Télé-expertise (le patient bénéficie d’une expertise d’un spécialiste, avec un autre soignant au chevet d’un patient).
F/ Téléconsultation en cabine de télémédecine avec un matériel adapté, voire dans le futur un praticien formé à la sémiologie de la téléconsultation.
Les Différentes limites et problématiques à la télémédecine ont été relevés et fait l’objet d’échanges et de débats :
A/ la contractualisation avec une société commerciale, Le rôle de l’Ordre des médecins est de vérifier le contrat passé entre le médecin et les sociétés commerciales dédiées à la télé consultation (respect du Code de Santé Publique, une évolution de ce code peut être envisagé à terme).
B/ la sécurité des données (serveur hébergeur, règles RGPD …).
C/ des télé consultations très rapides, ne permettant pas une bonne prise en charge du patient et lui étant préjudiciables.
D/ les télé cabines :
1/ la qualité du matériel de télécabine parfois médiocre et n’ayant pas toutes les accréditations obligatoires pour être utilisées.
2/ la localisation de certaines télécabines dans les grandes surfaces.
3/ Le Dr Baudino nous a partagé son expertise sur la télémédecine en télécabine et les avancées des études sur la télé-sémiologie, avec des publications en cours.
Les débats se sont portés sur :
A/ les risques médico-légaux inhérents à la pratique de la télémédecine, le Dr Lucas nous a rappelé l’importance de déclarer à sa RCP l’activité de téléconsultation, afin d’être couvert en cas de préjudice. Concernant les téléconsultations transfrontalières, elles sont possibles au sein de l’UE, mais pas sans démarches spécifiques selon les pays (USA ou en l’occurrence Ukraine lors de la crise actuelle).
B/ l’attractivité de l’activité de téléconsultant plutôt que d’installation en libéral, les participants ont pu évoquer les risques de perte de compétences en cas d’activité de télémédecine uniquement, la difficulté de motiver des effecteurs pour des activités de soin « classique » comme notamment les visites de nuit d’urgence. Le risque de déshumanisation et de perte de lien avec le patient était aussi une préoccupation partagée.
C/ L’utilité de la télémédecine :
1/dans certaine spécialité comme la psychiatrie :possibilité de faire des consultations dans un environnement familier pour le patient.
2/ limiter les risques de contamination, notamment lors des pics de COVID.
3/ recourir à des services de téléexpertise (ECG, dermatologie, psychogériatrie),ou la lecture à distance d’examens d’imagerie permettant d’alléger les gardes/astreintes de radiologues.
Sur le plan de la prospective, dans les années à venir devrait se dégager un cadre européen de la télémédecine, sur les pratiques et sur les outils, avec l’espace santé des patients normé, pouvant être transmis et traduit entre les professionnels de santé de la communauté européenne.
Pour conclure, la télémédecine est là, un outil dans nos pratiques, et l’usage que nous en ferons dessinera aussi bien nos pratiques que l’accès aux soins de nos patient. Le développement d’un cadre de recommandations et de bonnes pratiques est attendu des Collèges de spécialité, et une e-déontologie de la part de l’Ordre des médecins. Des études scientifiques sont publiées chaque jour sur le sujet, en attendant des données solides consolidées par des recommandations HAS.
Dr P. De Bremond D'Ars